Elle a toujours détesté le gaspillage. À l’âge de 8 ans, la petite Ellen économisait l’argent de la cantine pour s’offrir son premier dériveur. Dix-huit ans plus tard, à l’arrivée du Vendée Globe 2000-2001 dont elle a raflé brillamment la deuxième place, la jeune Britannique a ce cri du cœur : « La mer est une poubelle ! » Et de décrire tous les objets flottants qu’elle a croisés : bouteilles, conteneurs, plastiques… Ensuite, les victoires s’enchaînent – Route du Rhum 2002, record du tour du monde à la voile en 2005, etc. –, forgeant une immense noztoriété qu’elle met au service de la défense de l’environnement. Jusqu’à la création en 2010 de la Ellen MacArthur Foundation. Cette puissante organisation de 200 collaborateurs est capable de conseiller concrètement les entreprises désireuses de réduire leur empreinte carbone. Castorama, Danone, Auchan, Solvay, Veolia et tant d’autres ont souscrit. Grands patrons et hommes politiques saluent la force de conviction de la navigatrice et la manière dont, du haut de son mètre cinquante-sept, elle dirige sa croisade mondiale en faveur de l’économie circulaire. Son mantra est choc : « Lorsqu’une ressource est épuisée, on passe à une autre. Combien de fois pouvons-nous faire cela ? » Ellen, c’est son originalité et sa force, ne se définit pas comme une activiste climatique mais comme une réaliste. D’ailleurs, explique-t-elle volontiers, elle a mis un certain temps à définir la notion de durabilité. Faire plus avec moins, fort bien ! Mais comment ? Où cette décroissance s’arrête-t-elle ?

C’est grâce à un simple dessin dans un livre qu’Ellen MacArthur a eu le déclic : une ligne droite et, en dessous, un cercle. « Depuis la révolution industrielle, nous sommes dans une logique linéaire. Nous consommons des matières premières et des combustibles fossiles, les déchets s’accumulent et nous provoquons des changements climatiques. L’économie circulaire va à l’encontre de cette logique. Dès la phase de conception, nous devrions nous dire : fabriquons quelque chose qui sera réutilisé par la suite. »

Nul angélisme là-dessous. La Fondation a calculé avec le groupe de conseil McKinsey que l’économie européenne, à elle seule, pouvait économiser 630 milliards de dollars uniquement en réutilisant mieux les matières premières des machines à laver, des smartphones, des voitures ou de certains textiles. Une somme fabuleuse.
« Peut-être devrions-nous nous orienter vers un modèle dans lequel le fabricant tirera également profit de la durée de vie de la machine et de son entretien, estime aussi l’ex-navigatrice. On pourrait imaginer qu’il en reste propriétaire et qu’il puisse réutiliser les matériaux lorsque le produit ne fonctionne plus. Il faut repenser tout le système. »

À ceux qui doutent, Ellen MacArthur aime rappeler le soutien reçu à la Conférence de Glasgow, en 2021, de la part du numéro deux de BlackRock, le plus grand gestionnaire d’actifs du monde : « Si nous ne faisons rien pour résoudre les problèmes climatiques, notre prospérité sera amputée d’un quart. » Qui le souhaite ?